Partie c

LA FRANCE EN NC : EVITER L'INDEPENDANCE, QUOI QU'IL EN COÛTE ? -Partie C-

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C) Le pays serait déjà souverain, si les dés n’étaient pas pipés.

J. F. Kennedy disait : « Ceux qui rendent une révolution pacifique impossible rendront une révolution violente inévitable ». L’ONU ne dit pas autre chose : après avoir reconnu « le désir passionné de liberté de tous les peuples dépendants », elle déclare que le colonialisme « compromet la cause de la Paix » (Résolution 1514).

Les textes de l’ONU et de l’ADN sont clairs, et une décolonisation vers une indépendance amicale avec la France a longtemps été espérée, en cohérence avec ces textes, l’intérêt commun, et la volonté légitime et légale des autochtones (et d’autres) de recouvrer leur libre arbitre.

Mais une bonne part des allochtones, rendus nombreux par l’immigration voulue, influencés par certains intérêts ‘supérieurs’, mais aussi pour certains par un niveau de vie plus élevé que ce qu’ils auraient en métropole, suivent leurs leaders et ceux de l’État français pour une Calédonie française.

Et ils détiennent, contre toute équité, la plupart des rouages pour y parvenir. Etat des lieux :

1) Les deux députés

Jusqu’en 1977 il y avait deux circonscriptions (Est et Ouest) permettant à un indépendantiste et un « loyaliste » de représenter le pays, ce qui est équilibré : J. Lafleur d’un côté, R. Pidjot de l’autre.

En 1986, la droite redécoupe bizarrement le pays, et enlève le scrutin proportionnel au profit du majoritaire : depuis lors, les 2 députés sont à droite, bien que les indépendantistes progressent. Lafleur et Nénou en 1988, Gomes et Dunoyer actuellement.
Comme de plus le corps électoral général s'applique et non le citoyen, le verrouillage est renforcé.

Les moyens des députés sont considérables : ils sont seuls à donner leur avis à l’assemblée, seuls à poser des questions dont les clips s'insèrent régulièrement aux JT de nos chaînes TV. Leurs courriers arrivent dans tous les foyers, ils ont un accès privilégié sur nos antennes, un secrétariat conséquent, des déplacements et logements gratuits, etc.

Philippe Gomes, par exemple, a abondamment utilisé sa qualité et son titre de député pour 'booster' la distribution de son opuscule « Pour que continue à vivre le rêve calédonien » (sic), paru juste avant le 1er référendum en 2018 : outre sa qualité de député notée en couverture, la présentation a été faite en avant première sur la chaîne TV du Sénat français, puis à l’assemblée, et ensuite distribué gratuitement à la population.

2) Les deux sénateurs

Il n’y en avait qu’un (anti-indépendance, M. Loueckhote) jusqu’en 2011. Un second est alors ajouté, au scrutin majoritaire indirect (via des élus : les 2 députés + les 76 élus provinciaux + 446 des élus municipaux).
Ils sont issus du corps électoral général et non citoyen ; tous deux sont donc anti-indépéndantistes depuis lors : P. Frogier et G. Poadja.

Le cas de M. Frogier est à souligner : signataire de l’ADN, il en est l’un des pourfendeurs les plus acharnés, avec un sens éthique problématique. En 2010 pour s’opposer à la création d’un drapeau commun du pays (prévu par l’ADN mais il le niera sur NC1ère contre toute évidence), il obtient que le drapeau de Kanaky soit à côté de celui de la France. Toujours sur la chaîne d’État -très complaisante car le laissant dire-, il niera farouchement que ledit ADN vise une décolonisation, allant jusqu’à nier que la notion soit dans l’ADN, alors que le terme même y est écrit ! Plus récemment, il prône une différenciation des compétences entre les provinces qui frôle la partition, interdite par l’ADN. Il propose aussi la suppression du gouvernement et du congrès du pays, également interdits par l’ADN. Son rôle dans le reniement de l’accord est donc éminent, et ce du fait d’un poste obtenu grâce à la France et dont nous avons vu que la légitimité est problématique.

3) L’audiovisuel d’Etat : NC 1ère  (TV et Radio)

Pour mémoire, le Conseil National de la Résistance, regroupant toutes les forces politiques durant la guerre, des Gaullistes aux Communistes, avait dès 1944 déclaré son unité et proposé un vaste programme (« Les jours heureux ») exigeant entre autres pour les médias « indépendance à l’égard de l’État, des puissances d’argent et des influences étrangères ».
On en est loin, en France comme ici d’ailleurs.

Le CSA, Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et déclaré être son ‘gendarme’, « assure le respect du pluralisme politique ». On le suppose donc indépendant. Sur 7 membres, 3 sont désignés par le président de l’assemblée nationale (LREM), 3 par le président du Sénat (LR) ; et son président, M. Maistre, né en 1955 au Maroc, est désigné par … le Président de la République. CQFD.

Dans ce contexte, nous soutenons que NC1ère a une approche inéquitable des faits politiques de notre pays. Un minimum de déontologie équilibrerait les émissions politiques en proportion des forces avérées par les votes, soit près de 50 % pour le Oui comme pour le Non. Ce n’est clairement pas le cas. A défaut d’une enquête honnête par un organisme indépendant qui, compte tenu des enjeux, aurait dû se faire depuis longtemps, citons quelques exemples éloquents :

En 2018 déjà -première consultation.

- L’émission à épisodes « les chemins de l’histoire » refait alors vivre 'opportunément' l’histoire des douloureux événements de 1984/88. Les faits sont déformés, leur vision est biaisée, le ton très empathique du commentateur va sans retenue à un seul camp : les non indépendantistes. Extraits 1  2  3  4  5  ...

- L’émission à épisodes « En commune » dure aussi des semaines. Des discussions à bâton rompu interrogent des jeunes, auquels est posée la question de leur option Oui/Non à l’indépendance : et l’on voit des communes à majorité indépendantiste sans aucun protagoniste qui dit être pour le Oui, d’autres où l’un ose à peine l’esquisser, d’autres où la majorité dit « non ». L’inverse n’est bien sûr pas vrai, et les temps d’argumentation sont plus longs pour les tenants du Non. Clairement.

- Les micro-trottoirs sont biaisés. Exemple de celui réalisé dès que les termes de la question qui sera posée est arrêtée, officiellement pour savoir si les gens la comprennent : le micro laisse pourtant volontiers dériver vers un avis Non ou Oui, et les sélectionnés du Non sont largement majoritaire et plus longuement argumentés.

- Des personnalités politiques sont interviewées ? Les questions ne sont pas du tout du même type selon l’allégeance. Exemple l’interview de Mme Héo, élue indépendantiste, violemment attaquée à chaque question, quand M. Gomes est, lui, gentiment accompagné, parfois devancé ; sans compter le traitement global de l'information ! Exemple.

Nous retrouvons ces biais hélas en 2020 depuis plusieurs mois de façon tout aussi flagrante.

- Le document unilatéral de l’État ‘Conséquences du ‘Oui’ et du ‘Non’ », que les indépendantistes déclarent irrecevable car très militant pour le Non, est restitué à l’identique par thème sur des semaines, sans que soit même mentionnées les opinions adverses, les erreurs ou omissions ! (Voir notre étude critique dudit document)

- L’émission « dans ma commune » reprend les travers de « en commune » en 2018 en privilégiant les interviews contre le Oui : le constater est rapide car le téléspectateur peut rapidement compter les interventions pour le Non et celles pour le Oui, puis les comparer avec le tableau affiché des résultats Oui et Non de la commune !

- Au JT, les séquences d’abord intitulées imprudemment « journal de campagne » puis rectifiées « Journal du référendum » (terme d’ailleurs erroné) assènent encore leurs contrevérités unilatérales :

Il y a « L’histoire du pays » qui reprend le discours très biaisé des « chemins de l’histoire » de 2018, tous les jeudis au JT sur 8 semaines, avec le même animateur, les mêmes travers : très Euro-centré, marginalisant l’histoire Kanak avec une certaine condescendance, parfois indignation.

Il y a « Bon à savoir » caricature simplifiée du document de l’État, le présentant à nouveau, en clips rapides et réducteurs, toujours sans aucune analyse ou esprit critique : NC1ere se fait JT d’État partisan, sur la nationalité, la monnaie, les transferts financiers, etc. Un militantisme pur et dur. Avec des erreurs, des oublis, des approximations, des clichets simplistes...

4) L’unique quotidien, « Les Nouvelles Calédoniennes ».

Ex-titre du groupe Hersant / Tapie, il est opportunément racheté en 2013 (le 1er référendum pouvait être déclenché à partir de 2014) par trois grandes familles locales richissimes et de droite : Lavoix, membre fondateur du RPCR, Jeandot (Import automobiles), et Montagnat (Mines). Dans le panier étaient aussi une radio (NRJ), deux imprimeries (IRN et Pacific Print), et un hebdo (Paru Vendu).

Le lien fort avec les annonceurs, source de revenus clé, empêche toute création d’un second quotidien dans ce marché restreint, bien qu’ils furent longtemps deux, avec « la France Australe » (sic).

La moitié des journalistes claquent alors la porte. Un rédacteur en chef de choc est nommé, O. Poisson, 18 ans à Nice-Matin, une référence de la droite dure ; Nice est d’ailleurs jumelée à Nouméa.

L’équipe rédactionnelle est alors complétée de jeunes métropolitains, bafouant ainsi l’emploi local ; et l’on peine à y trouver quelque océanien ou Kanak, voire caldoche, à part … aux rotatives.

La puissance est considérable : il passe de main en main dans les familles et les entreprises voire salles d’attente ; il a des affiches devant chaque lieu de vente, stations, magasins, tabacs. Son site laisse transpirer dans nos boites email des articles opportunément choisis en accès libre.

5) Les Radios privées

RRB, « Radio Rythme Bleu », créée par le RPR local, est la radio quasi officielle des anti indépendance. Il y a un pendant indépendantiste, Radio Djiido. Chacune vit difficilement, mais les aides vont davantage à RRB, qui peut ainsi payer des droits d’émission lui permettant d’être présente partout, notamment sur route en ‘Brousse’ et dans bien des tribus éloignées, là ou Djiido peine à être audible.

6) Les pressions de l’État et des anti-indépendance : coups bas et duplicité.

- Problèmes sur la Loi Organique (L.O.). Celle-ci précise les modalités d’application de l’Accord constitutionnalisé dit ADN. Elle est votée en termes identiques par l’assemblée nationale et le Sénat. Or, à plusieurs reprises, le législateur a tenté des transgressions :
   L’ADN prévoit trois consultations possibles, le législateur, via la LO, a tenté de les réduire à deux ; le conseil constitutionnel a fini par censurer, la manœuvre étant trop visible, 2 n’est pas 3.

   L’ADN prévoit qu’au cours du 2nd et 3ème mandat du Congrès, « les compétences suivantes seront transférées (…) » ; traduction du législateur via la LO : « Le congrès peut, à partir du début de son mandat commençant en 2009, adopter une résolution tendant à ce que lui soient transférées, par une loi organique ultérieure, les compétences suivantes : (...)» ! [soulignés par lindependant-knc].

Et là, le conseil constitutionnel a validé ! Résultat, de nombreux transferts faisant progresser le pays vers sa souveraineté ont ainsi été bloqués, la majorité anti indépendance au congrès reniant sa signature.

- Problèmes sur l'immigration et la protection de l’emploi local
   L’État français n’a rien fait pour «  décourager ou prévenir l’afflux » de ‘colons’ , trahissant sciemment les exigences de l’ONU (Cf résolution 35/118 ci dessus), poursuivant ainsi sa pression contre l’indépendance par noyade démographique : il y a maintenant 35 000 votants ajoutés sur la liste générale dont beaucoup, poussés par les droites qui les courtisent pour les députations et pour la pression anti-indépendantiste qu’ils accentuent, s’indignent de ne pas être sur la liste spéciale référendum !

   L’État français n’a sciemment pas informé correctement ces personnes à leur arrivée qu’il était légal et légitime qu’il ne soient pas « citoyens » du pays « non autonome » administré par la France, et également légal et légitime que des restrictions à l’emploi local y soient en vigueur.

   Le résultat est une amertume, une rancune et un ressentiment … illégitime à l’encontre des indépendantistes, qui fait peser lourdement ces quelques 50 000 résidents (avec les mineurs) contre l’indépendance.

   La loi locale de protection de l’emploi a mis 12 ans (2010) à être votée, et reste largement contournée via des ‘patentés’ et par des patrons réfractaires et généralement contre l’indépendance.

- Problèmes sur les sondages
   Comme tant d’autres chose, un sondage est présenté comme non partisan ; là encore il est permis d’en douter fortement : quelques mois avant la consultation 2018, les ‘Non’ seraient 60 % selon I-scope et 69 à 75 % pour Kantar ; et les ‘Oui’ de 14 à 22,5 %. Réel : 43,3 % de Oui, 46,6 % de Non.

   Les Médias pilonnent sur leurs chiffres, le FLNKS doit batailler contre le découragement, tracter contre une « fake news ».

   Kantar fait l’objet de plusieurs polémiques. Le fils de Mme Macron en est « Senior Vice-Président ».

   I-scope est une Sarl proche des milieux d’affaire locaux.

Pour la consultation 2020, des sondages plus discrets ont été réalisés, aux résultats aussi peu crédibles.

Problèmes de « coups de pouce » par modification ou interprétation de textes selon l’enjeu :
   Le code électoral interdit l’utilisation des signes nationaux pour les campagnes ; mais comme les indépendantistes brandissaient le beau drapeau Kanaky (qu’ils ont proposé comme signe du pays et qui l’est de facto sur Internet), la droite a demandé -et obtenu- une dérogation pour pouvoir utiliser les couleurs de la France, et le drapeau Bleu Blanc Rouge notamment. Pourtant, ils ne parlent pas au nom de l’État Français, prétendument neutre, ni des citoyens français, que les sondages montrent majoritairement (65 et 66%) pour notre indépendance !

   Les libellés de la question à poser aux consultations n’étaient pas écrits dans l’ADN. Un décret devait les rédiger. L’idée force à proposer était la pleine ‘souveraineté’ (terme 8 fois écrit) : mais la droite a voulu ajouter le mot ‘indépendance’, absent de l’ADN pourtant (M. Frogier exigeait même que ce soit le seul, et qu’il n’y ait pas souveraineté !). L’État a suivi. 
Pourquoi ? L’idée d’être souverain est plaisante, l’on peut décider de tout (‘Chant du Départ’ : le peuple souverain s’avance...) ; ‘In-dépendance’ regarde vers la France qui ne serait plus là pour nous. La question posée en 2018 fut donc : « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? »
   Rien n’empêchait à priori une modulation de la question à la 2nde et 3ème consultation : le fait d’avoir 3 consultations possibles suggérait même la souplesse. Mais là, non, moduler serait suggérer des partenariats, que souhaitent les indépendantistes, et il fallait cliver. Il fut décidé que le libellé serait immuabl
e.

Le dernier avatar est celui de la transgression dans son esprit de l’article 5 de l’ADN, qui précise : « Si la réponse est à nouveau négative, une nouvelle consultation pourra être organisée selon la même procédure et dans les mêmes délais ». Or en votant le 12/12/2021, l’on passe de 23 mois entre les consultations 2018 et 2020, à 14 mois entre celle de 2020 et celle de 2021.

Sans parler de l'esprit bafoué du préambule de l'ADN sur l'épisode en cours de la Covid, quand ce peuple est davantage secoué par davantage de deuils, qui ont davantage d'impacts, alors que pourtant l'Etat et les 'loyalistes' veulent, quoi qu'il en coûte, lui imposer de gérer sereinement une campagne référendaire et un vote essentiels pour lui, afin de profiter de cet état momentané de détresse culturelle profonde pour l'emporter. Car Oui, ils craignent la logique mathématique qui peut, après un 43.3% suivi d'un 46.7% de Oui, mener à un 'plus de 50%'. Dans des conditions normales.
Non kanak et Etat n'ont-ils pas signé ces engagements de l'ADN de 
« reconnaître les fautes, de restituer au peuple kanak son identité confisquée », e« d'ouvrir une nouvelle étape, marquée par la pleine reconnaissance de l'identité Kanak » ?

Ce dernier épisode choquant et en cours, sera développé dans notre dernière partie : 

LIRE NOTRE 4ème -et DERNIÈRE PARTIE :
D) Les Forfaitures Lecornu

 

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